Les femmes, héroïnes de la lutte antiraciste contre les violences policières

Mobilisation impressionnante ce mardi 2 juin 2020, premier jour du plan de déconfinement, nous sommes une marée humaine massée (à défaut d'être nassée) devant le TGI de Paris.
20 000 personnes selon la préfecture. 80 000 selon les organisateurs. C'est historique. Ce combat n'en serait pas là sans Assa Traoré. C'est son âme, son sang, sa sueur qui animent cette lutte pour #JusticePourAdama.

J'ai remarqué que dans ces circonstances tragiques, ça se passe souvent comme ça :
un frère meurt, une femme - sa soeur (ex: Assa Traoré, Amal Bentounsi), sa mère (ex: Latifa Ibn Ziaten) ou sa compagne (ex: Doria Chouviat), endosse la responsabilité d'honorer sa mémoire et lutter pour obtenir justice ou réhabilitation (la criminalisation de la victime étant la règle dans ces affaires). Le sacerdoce des femmes racisées dans cette lutte contre la violence policière et judiciaire à caractère raciste.

Assa Traoré est cette icône de la lutte contre les violences policières racistes mais doit-elle être un modèle ? Devons-nous femmes noires embrasser la carrière de figure sacrificielle et dédier notre vie entière à défendre la mémoire de nos frères de manière inconditionnelle?

Nos frères doivent se demander ce qu'ils peuvent faire pour être à la hauteur de l'engagement dont nous, les femmes, avons fait preuve dans l'histoire pour se battre et défendre nos frères, nos fils, nos pères et toute notre communauté face aux injustices d'un système qui pourtant ne nous épargne pas non plus.

Nos frères doivent, avec la même détermination, se questionner aussi sur leur rôle dans les injustices que nous subissons. Nous avons démontré notre amour et notre engagement pour vous. Les femmes Noires de la diaspora sont en droit d'attendre le même niveau d'amour, d'engagement, de protection inconditionnels des hommes noirs que celui dont ils bénéficient. Assa Traoré et les autres doivent être un modèle pour eux. 

Je parle d'Amour parce qu'on ne mène pas ce genre de combat sans Amour.
La colère est un moteur qui ne peut vous mener que jusqu'à un certain point. Et la colère consume. Draine. Épuise. La colère vous fera démarrer une machine de lutte mais pas tenir la longueur des années qu'exige un militantisme tourné vers une réforme totale du système.

La tristesse non plus. Elle peut être moteur mais avec le temps, le chagrin est digéré et il fait partie de vous. Un jour, on passe toutes les étapes du Deuil. La tristesse ou la colère ne fournissent pas ce flux d'énergie constant, stable, diffusée calmement au fil du temps. L'Amour, c'est le sucre lent de la lutte. L'Amour des siens, de soi, de son identité, de sa communauté, de son peuple et des autres. Il nous mène loin. Je souhaite pour nous femmes Noires, un Amour de soi pour soi, un Amour de nos frères pour nous, un Amour aussi sucre lent que celui professé tous les jours depuis 4 ans à Adama par Assa.

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